Soc. du 26 juin 2012 n°pourvoi 11-15310 :Un employeur ne peut pas consulter les emails d’un de ses salariés, même professionnels, en son absence, dès lors que le règlement intérieur de l’entreprise prévoit expressément que ce contrôle ne peut être fait qu’en présence de l’intéressé.

S’agissant de la consultation des boites mails des salariés par l’employeur, la jurisprudence est désormais bien fixée :

les emails adressés ou reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour son activité sont présumés avoir un caractère professionnelle. Conséquence : l’employeur peut y avoir accès même en l’absence du salarié. Seule limite : s’ils sont clairement identifiés comme personnels.

Dans ce dernier cas, l’employeur peut toutefois demander à les consulter s’il y a un danger urgent. Il doit alors demander au président du tribunal compétent l’autorisation de faire intervenir un huissier de justice en vue d’accéder, par son intermédiaire, à certains mails suspects et établir un procès-verbal en présence du salarié.

 Il s’agit là de règles générales. La Cour de cassation nous apprend que des dérogations sont possibles si l’entreprise elle-même a prévu des règles plus restrictives.

L’arrêt revient sur les modalités des contrôles réalisés en l’absence du salarié.

L’entreprise en cause dans cet arrêt du 26 juin 2012 reprochait à son responsable du service informatique de s’être introduit dans la boite mail du PDG afin de récupérer le bilan personnel de l’évolution de son salaire et l’ensemble des grilles de proposition des augmentations des salaires entre 2005 et 2008. Le salarié souhaitait se constituer un dossier pour un contentieux futur et avait transmis les documents à son avocat. Afin de valider ses soupçons, l’employeur avait fait intervenir un huissier de justice qui avait constaté que la boite mail du salarié avait été vidée, puis une société de services en informatique qui avait fait remonter une sauvegarde de la boite permettant de prendre connaissance des mails envoyés.

Le salarié conteste son licenciement pour faute grave qui s’en est suivi, estimant qu’il repose sur un moyen de preuve illicite car les contrôles ont été réalisés en son absence.

L’employeur pour sa part estime être dans son droit rappelant la position de la Cour de cassation qui l’autorise à consulter les mails envoyés grâce à l’ordinateur de l’entreprise car présumés professionnels et ce, même en l’absence du salarié.

Et en violation du règlement intérieur…. Oui, estime la Haute cour, sauf qu’en l’espèce le règlement intérieur de l’entreprise avait fixé des règles plus drastiques. Il prévoyait que les messageries électroniques des salariés ne pouvaient être consultées par la direction qu’en présence du salarié, qu’il s’agisse de mails personnels ou professionnels. Et la Cour de cassation ne voit aucune objection à ce que les entreprises édictent des règles plus sévères que les siennes : “le règlement intérieur peut toutefois contenir des dispositions restreignant le pouvoir de consultation de l’employeur en le soumettant à d’autres conditions”.

Bien évidemment, il y a peu de chances qu’elle n’accepte en revanche des règles qui viendraient assouplir le contrôle de l’employeur. (Arrêt Cour de cassation, chambre sociale du 26 juin 2012 n°pourvoi 11-15310)